Nomination de Paul Yao N’dré au Conseil constitutionnel 
LES REACTIONS FARFELUES DE L’OPPOSITION

 

Le 8 août dernier, le président Laurent Gbagbo a nommé un nouveau président du Conseil constitutionnel. Une nomination qui émeut au plus haut point l’opposition.

La situation d’exception que vit la Côte d’Ivoire du fait de la crise politico-militaire a-t-elle fait croire à un certain nombre d’individus que la Constitution a été mise en veilleuse ? Il y a lieu de se poser des questions quand on constate les gesticulations de l’opposition depuis la nomination du professeur Paul Yao N’dré comme président du Conseil constitutionnel. L’homme a pourtant le profil de l’emploi. Agrégé en Droit constitutionnel, le professeur Yao N’dré est d’une compétence reconnue par tous en milieu universitaire. Le fait, soutiennent ses détracteurs, qu’il soit un fidèle compagnon du chef de l’Etat suscite de l’inquiétude chez l’opposition du fait que ce cadre ait été nommé quelques mois avant les élections prévues pour le 29 novembre 2009. Doit-on en rire ? 

M. Yao Paul N’dré succède à M. Yanon Yapo, dont le mandat est venu à expiration. M. Yanon Yapo avait quant à lui, succédé à M. Noël Nemin, un ami intime de Henri Konan Bédié, un homme de confiance. M. Nemin a occupé ce fauteuil en 1994, au moment où Henri Konan Bédié, président du Pdci, était en même temps, chef de l’Etat. Son parti avait une majorité écrasante à l’Assemblée nationale dont il occupait la présidence, ainsi que dans toutes les institutions du pays. C’était la belle époque ! Une époque pendant laquelle les journalistes allaient en prison chaque fois que le potentat se sentait “insulté”. C’était l’époque à laquelle, l’opposition alors dirigée par Laurent Gbagbo réclamait à cor et à cri, une commission électorale indépendante pendant que les caciques du Pdci lui rétorquaient que le ministère de l’Intérieur avec à sa tête, Emile Constant Bombet, un maître de la “technologie électorale” (euphémisme désignant la maestria avec laquelle il excellait dans la manipulation des résultats) suffisaient amplement à remplir cette mission. Henri Konan Bédié, a préféré faire tirer sur des Ivoiriens lors de l’élection présidentielle de 1995 que de céder aux légitimes exigences de l’opposition. Cet homme peut-il logiquement critiquer aujourd’hui Laurent Gbagbo ? La question fondamentale est celle-ci : la loi permet-elle au président Gbagbo de nommer les membres du Conseil constitutionnel ? A-t-il le droit de mettre à la tête de cette institution un homme de son choix ? Si la réponse à ces deux questions est “OUI”, alors, tout le reste n’est que verbiage. La Constitution de la République de Côte d’Ivoire n’est ni suspendue, ni supprimée. Les accords de Ouaga, comme tous les autres ont bien précisé la primauté de la Constitution sur tous les accords. La Côte d’Ivoire est donc assise sur un socle qui est la Constitution. Toute autre considération est farfelue. Et ce n’est pas la France vers qui regardent tous les valets de l’ex métropole qui donnera des leçons dans ce sens à la Côte d’Ivoire. 

En 1995, François Mitterrand nomme Roland Dumas Président du Conseil constitutionnel. C’est un fidèle des fidèles. Membre du parti socialiste, il a accompagné le président Mitterrand dans toutes les aventures. Sous sa présidence, le Conseil constitutionnel a rendu un avis affirmant que l'immunité judiciaire du Président de la République s'imposait y compris pour les crimes et délits de droit commun. Yves Guéna qui lui succède en 1999 est un vieux briscard gaulliste que Chirac nomme. Il le remplace le 27 février 2004 par Pierre Mazeaud, puis le 23 février 2007, par Jean-Louis Debré, un autre intime. 

Gbagbo n’a donc rien inventé. Il était de toute façon temps qu’il réagisse. Il a accepté de faire des concessions inimaginables à ses adversaires. Il a laissé l’opposition armée et politique s’emparer de la commission électorale indépendante, contre toute règle prévue par la Constitution. Il a souscrit à l’idée de confier l’identification de la population à Sagem, une entreprise française choisie par ses adversaires, il a accepté de nommer le responsable de la rébellion à la primature pour conduire le processus électoral. Qu’attendaient encore l’opposition ? Qu’il nomme à la tête du Conseil constitutionnel Henri Konan Bédié ou Alassane Ouattara ? Le président Gbagbo a fait tellement de concessions que l’opposition a fini par croire qu’elle avait le droit de co-nommer les responsables d’institutions avec lui. Il est temps de mettre fin à la comédie. 

De création récente et institué en remplacement de la chambre constitutionnelle de la cour suprême, la composition, l'organisation, les attributions et le fonctionnement du conseil constitutionnel sont d’abord fixés par la loi n° 94-438 du 16 août 1994. Il est régi aujourd’hui par les dispositions de la Constitution du 1er août 2000 (articles 88 à 94) qui fixe ses attributions et par la loi organique n° 2001-303 du 5 juin 2001 qui en détermine l'organisation et le fonctionnement. Voici ce que dit la loi :“Le conseil constitutionnel est juge de la constitutionnalité des lois. Il est l'organe régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics. Il contrôle la régularité des opérations de référendum et en proclame les résultats. Il statue également sur l'éligibilité des candidats aux élections présidentielles et législatives, les contestations relatives à l'élection du président de la république et des députés, et proclame les résultats définitifs des élections. Le conseil constitutionnel constate la vacance de la présidence de la république, il contrôle la conformité des engagements internationaux et des lois organiques à la constitution. Les projets et propositions de lois peuvent lui être soumis pour avis. Le conseil constitutionnel est composé d'un président et de conseillers nommés par le président de la république. Il comprend également des anciens présidents de la république, sauf renonciation expresse de leur part”. Ce n’est pas Gbagbo qui a créé ce texte, c’est une constituante composée de toutes les opinions qui l’a rédigé lors de la transition en 2000. Dont acte.

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